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Qu’est-ce qui menace le développement des entreprises ?

27 janv. 2020 La Vie Eco

La rareté des compétences représente une menace au point de peser sur la croissance des entreprises. C’est ce qui ressort de la dernière enquête d’IBB Institute, le centre de recherches du cabinet IBB Executive search.

L’enquête a été menée entre mars et mai de l’année dernière auprès de 101 dirigeants et cadres dirigeants. Près de la moitié des entreprises participantes représentent des multinationales et près des deux tiers réalisent un CA de plus de 500 MDH. Par secteurs, le quart des sociétés opère dans l’industrie, 19% dans le FMCG (Fast-moving consumer goods), 16% dans la finance et le conseil, 14% dans la distribution, 13% dans les services. Le reste est réparti entre les télécoms/IT et BTP/immobilier.

Les grandes tendances de l’enquête font ressortir que les perspectives d’emploi des entreprises pour les 3 à 5 ans à venir sont prometteuses a priori sur le papier.

Ainsi, 55% des entreprises prévoient d’accélérer le rythme des recrutements durant cette période, tandis que 40% d’entre elles prévoient une stagnation des recrutements. Cela ne les empêche pas de poursuivre les embauches à un rythme identique aux années passées. Seulement 5% des entreprises sondées anticipent une régression du rythme de recrutement au cours des 5 prochaines années.

A noter que le rythme des recrutements s’accélère, particulièrement pour les entreprises marocaines (67% contre 45% pour les multinationales) qui se voient orientées vers des projets d’expansion.

Si tous les secteurs sont bien évidemment concernés par l’accélération du rythme des recrutements, ceux inscrits dans des dynamiques sectorielles nationales ou d’investissement/développement tels que l’IT/télécoms, les services, la distribution ou encore l’industrie anticipent des besoins de main-d’œuvre qualifiée plus importants que la moyenne. En revanche, le secteur FMCG, guidé par des projets d’optimisation et de consolidation, table sur une stagnation des recrutements dans les 3 à 5 ans à venir.

Les DG pointent du doigt avant tout la hausse du niveau des rémunérations

Toutefois, ces stratégies de croissance envisagées seraient entachées par les difficultés de recrutement. L’enquête d’IBB montre que la rareté des compétences (techniques ou comportementales), la forte concurrence sur les mêmes profils ou encore le niveau de rémunération élevé des candidats figurent dans le trio de tête des motifs de difficultés de recrutement avec respectivement 66% 59% et 56% des cas.

Marie Agot, manager au sein du cabinet IBB, souligne à cet effet que «les entreprises semblent plus inquiètes de la rareté des compétences que d’autres menaces, plus communément évoquées telles que l’économie informelle ou les difficultés de trésorerie». Et d’ajouter que, «par voie de conséquence, 86% des entreprises du panel estiment que la difficulté à recruter pourrait entacher leur développement en causant un retard, un report, voire une annulation de leurs projets».

Les entreprises marocaines se sentent davantage menacées que les multinationales, qui sont d’une part engagées sur des projets moins expansifs et qui peuvent, d’autre part, s’appuyer sur les ressources de leurs maisons mères en cas de difficulté de recrutement. Si la majorité des entreprises expliquent ces difficultés par des facteurs exogènes, il n’en demeure pas moins que l’allongement des délais de recrutement, le manque de moyens pour recruter ou encore la difficulté à définir le besoin constituent également de sérieux motifs de difficulté.

Par ailleurs 64% des directions générales (présidents, DG et secrétaires généraux) pointent du doigt la hausse des rémunérations comme étant le premier facteur de difficulté au recrutement contre 51% de directions RH. Ces dernières semblent plus soucieuses des difficultés intrinsèques au marché et s’alarment davantage de la rareté des compétences (75% des DRH vs 56% des PDG) et de la forte concurrence sur les mêmes profils (67% vs 47%).

L’expansion en Afrique ou l’amélioration de la performance organisationnelle représentent les projets les plus menacés

Par secteur, l’enquête montre que les FMCG, la distribution, l’industrie et les services s’inquiètent particulièrement de la rareté des compétences alors que celui des IT/télécoms craint en premier lieu la concurrence sur les mêmes profils. Le secteur financier et les cabinets de conseil, quant à eux, citent prioritairement les rémunérations élevées, tandis que les secteurs BTP/Immobilier et les services évoquent la rareté des profils ayant la séniorité recherchée.

Bien évidemment, les conséquences de ces difficultés impacteraient fortement les projets stratégiques des entreprises. Selon l’enquête, ces derniers pourraient connaître des retards, des reports ou des annulations, à défaut de pouvoir recruter aisément.

Les projets les plus menacés de retard, report ou annulation sont l’expansion en Afrique, l’amélioration de la performance organisationnelle, l’innovation et la R&D, puisque plus de 9 entreprises sur 10 s’y inscrivant anticipent ce risque. Les secteurs IT/télécoms, BTP/immobilier, services financiers et conseil, industrie sont les plus exposés à des retards, reports ou annulations de projets. De même que 85% des entreprises qui envisagent la croissance externe estiment que leur développement sera ralenti et qu’elles reculeront face à leurs concurrents faute de pouvoir renforcer leurs équipes.

Peu de solutions innovantes et l’alignement au marché reste la règle pour attirer les talents

Alors que faire pour éviter ces péripéties ? Les solutions envisagées ne semblent guère innovantes. Ainsi, le renforcement de la mobilité et de la formation» est le premier levier utilisé pour recruter en interne, à défaut de trouver les compétences en externe (cité dans 72% des cas).Cette solution implique de bien évaluer en amont le vivier de compétences actuelles par rapport aux besoins futurs. Le «recours à des cabinets de recrutement spécialisés» et le «renforcement de l’attractivité de l’entreprise» sont cités dans 64 et 63% des cas.

Pour Marie Agot, «d’autres solutions peuvent également être envisageables, comme la mise en place de l’expérience collaborateur, le renforcement d’une culture interne inspirante et fédératrice, l’introduction de nouveaux modes de collaboration et de staffing tels que le freelancing, le partage de ressources entre plusieurs entreprises ou plusieurs services, contrat “mission”. Ces nouvelles pratiques permettent d’optimiser l’allocation des expertises et offrent au plus grand nombre d’actifs de contribuer au développement des entreprises». Enfin, l’enquête montre que très peu d’entreprises envisagent une «revalorisation des grilles salariales» au recrutement, ces dernières jugeant déjà que les rémunérations pratiquées sont élevées. Dans certains cas, l’alignement au marché reste malgré tout une condition pour attirer les talents dans un contexte de forte concurrence.

La «réorganisation de la DRH» est considérée par uniquement 11% des entreprises alors que paradoxalement 55% d’entre elles comptent accélérer le rythme des recrutements durant les 3 à 5 ans prochains et 97% d’entre elles estiment que les difficultés de recrutement seront fortes ou modérées.

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