Les laboratoires pharmaceutiques sont remontés contre les restrictions sur les exportations de médicaments instaurées depuis le début de l’état d’urgence sanitaire. Elles sont soumises à une «formalité lourde, répétitive et surtout incompréhensible pour les industriels». «Les exportateurs doivent fournir une multitude de documents pour chaque opération ainsi que des informations hors sujet telles que le numéro de l’autorisation de mise sur le marché au Maroc.
Pourtant, les documents exigés sont ceux-là même qui sont fournis par la Direction du médicament et de la pharmacie. De plus, le numéro de l’AMM (Autorisation de mise sur le marché) ne concerne en rien le pays où nous exportons», tempête un industriel. Un autre se plaint en plus du fait que l’on exige aussi de dévoiler le montant de la facture qui devrait rester confidentiel puisque les prix ne sont pas réglementés à l’international.
Depuis l’institution de nouvelles règles pour l’exportation de médicaments, l’Association marocaine des industriels pharmaceutiques (AMIP) a saisi les ministres de la Santé et de l’Industrie à deux reprises au sujet des lourdeurs administratives instituées au moment où le gouvernement a amorcé un vaste projet d’assouplissement des procédures. Mais l’initiative est restée sans réponse.
Au moment où ils s’attendaient à un allègement des démarches, ils ont été surpris par la circulaire de la Douane. Une circulaire datée du 20 avril qui confirme la procédure instituée par le ministère de la Santé.
Sur un autre registre, le gouvernement devrait lâcher du lest sur les exportations de médicaments. L’un des rares secteurs à pouvoir encore exporter et à drainer des devises au moment où les réserves sont sous tension. En 2019, les exportations ont atteint 1,27 milliard de DH.
La situation de blocage coïncide avec la pandémie du coronavirus qui se traduit par conjoncture morose. En effet, avec la fermeture de cabinets médicaux, l’annulation des rendez-vous dans beaucoup de cliniques, les ventes de médicaments ont connu une chute drastique.
«Depuis le début de l’état d’urgence, les pharmaciens se tournent les pouces. La plupart du temps, les clients viennent en pharmacie uniquement pour se renseigner sur les masques. Les personnes atteintes de maladies chroniques ont acheté leur stock de médicament au début de la crise», confie un pharmacien d’officine.
En amont, les industriels anticipent une baisse de 80% du chiffre d’affaires pour le mois d’avril en comparaison avec le même mois de 2019. «La dernière semaine coïncide avec ramadan. Elle ne permettra donc pas de redresser la barre», souligne un industriel. En temps normal, les industriels exportent pour 1 milliard de DH par an de médicaments.
Les restrictions de l’export s’expliquent par la volonté du gouvernement de sécuriser les besoins du Maroc pendant la pandémie. Une chose que beaucoup de pays appliquent pour les mêmes motifs. Sauf que pour les industriels, ces restrictions sont exagérées, d’abord par la lourdeur de la procédure.
Ensuite, par la généralisation de ces contraintes à tous les médicaments. Y compris ceux qui ne sont pas en rapport avec le traitement du coronavirus. C’est la raison pour laquelle les industriels proposent que le ministre publie une liste négative de médicaments interdits à l’export. Une disposition qui permettrait d’exporter les produits pharmaceutiques autorisés de facto sans passer par une procédure bureaucratique.
Par ailleurs, les industriels affirment s’être engagés depuis quelques semaines dans un programme d’achat de matières premières pour exporter en Afrique et dans les pays arabes et ce, sans pénaliser l’approvisionnement des hôpitaux, des pharmacies d’officine et de l’armée. D’ailleurs, les industriels sont tenus d’adresser chaque semaine à la direction du Médicament et de la Pharmacie l’état des stocks des produits finis, des en-cours et des matières premières.