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Ne pas mettre tous les employeurs dans un même panier : Les patrons citoyens, ça existe !

16 juil. 2020 Libération

Sur les 3,54 millions de travailleurs déclarés à la CNSS, le Fonds spécial pour la gestion de la pandémie n’a apporté son aide qu’à 716.000 salariés déclarés en arrêt temporaire du travail en mars, 892.711 en avril, 900.914 en mai et 593.000 en juin.

Au plus fort de la crise sanitaire donc, un employé déclaré sur quatre n’a pas vu la couleur des subsides de ce Fonds qui, par ailleurs, a fait de la belle ouvrage en permettant d’atténuer l’impact du confinement sur la bourse des ménages d’un nombre important de citoyens. Ceci est donc officiel puisque c’est le ministre du Travail et de l'Insertion professionnelle, Mohamed Amekraz, qui en a fait état en réponse à une question centrale sur "La stratégie du gouvernement pour la relance de l'emploi après la crise du coronavirus" à la Chambre des représentants. Lequel a également souligné que les 593.000 employés mis dans le « filet social » en juin travaillent dans 95.135 entreprises.

Il a néanmoins omis de préciser que le nombre des entreprises déclarantes à la CNSS tel qu’il figure sur le site Internet de celle-ci est de 252.145 unités, laissant ainsi aux élus de la nation et aux organes de presse la l’attitude de se lancer en conjectures concernant le sort qui a ainsi été réservé à la majorité écrasante des travailleurs marocains contraints par la pandémie de Covid-19 de cesser toute activité et, partant, de ne pouvoir gagner leur vie à la sueur de leur front.

Les détails de l’intervention du ministre dont l’agence MAP s’est fait l’écho indiquent que l'hébergement et la restauration sont considérés comme l'un des secteurs les plus touchés par la pandémie, dans ce sens où 93% de ses entreprises ont déclaré être dans une situation difficile, suivi par celui des services administratifs et des activités de soutien aux affaires (76%) et par ceux des industries manufacturières (71%) et de la construction (70%).
Est-ce à dire que les patrons de ces entreprises n’avaient pas engrangé suffisamment de bénéfices préalables pour en faire bénéficier leurs salariés au moment où ils en avaient le plus besoin? A en juger par leur train de vie, la réponse ne peut être que négative.

Est-ce qu’il existe au Maroc des patrons autrement plus sociaux que ceux-ci ? La réponse ne peut être que positive et, au vu des statistiques fournies par le ministre, ils sont autrement plus nombreux et leur classement par ordre de mérite peut d’ailleurs être facilement établi en se référant aux dons qu’ils ont faits au Fonds spécial pour la gestion de la pandémie.
Autre point à relever dans l’intervention de Mohamed Amekraz, sur les 252.145 entreprises déclarantes, 4.696 quiont repris leurs activités ont été visitées par des commissions compétentes dans le cadre des contrôles des mesures de précaution mises en place et de leur conformité au protocole sanitaire en vigueur.

Cette faiblesse des contrôles et le peu d’entrain dont certains patrons font montre pour se mettre au diapason des décisions gouvernementales pourraient donc aisément expliquer que les cas enregistrés parmi les salariés, leurs familles et les personnes qui les ont côtoyés avoisinent les 47% des cas Covid confirmés depuis le lancement de la reprise graduelle de la dynamique économique, comme l’a confirmé le ministre de l’Intérieur lors de sa dernière réunion avec la CGEM.

A moins d’en accélérer le rythme, le danger de voir la situation dégénérer reste donc d’autant plus prévisible que ces opérations ont déjà débouché sur l'émission de 514 décisions de fermeture d'unités industrielles et commerciales pour non-respect des mesures sanitaires en vigueur.

La communication publique, comme chacun le sait, s’inscrit dans le cadre des missions de l’information de service public et doit en respecter les règles en vigueur, tant déontologiques que juridiques. Elle doit aussi respecter la nécessaire transparence des informations qu’elle véhicule et, surtout, s’assurer de ne pas tromper ses destinataires par omission.
Son objectif n’est pas, en effet, de rassurer, ni d’être anxiogène, mais de donner des gages de confiance dans les décisions prises par les pouvoirs publics et ne pas générer de la défiance au sein de l’opinion publique.

Edward Bernays, célèbre auteur de « Propaganda », considéré comme le père de la propagande politique... et des relations publiques, avait théorisé l’importance de s’astreindre en situation de crise à la vérité pure et simple.

Adepte de l’efficacité, il rappelait que par temps calme la communication pouvait dire n’importe quoi. Or en pleine tempête il fallait déjà privilégier d’autres manœuvres et « dire toute la vérité et rien que la vérité » afin d’éviter le naufrage.

Il serait précieux qu’en ces temps de pandémie,l’on revienne aux fondamentaux.
En crise, un principe est admis, celui de la loi de Murphy plus connue comme « loi de l’emmerdement universel ».

Quand les choses tournent mal, un événement plus grave encore fait irruption au pire moment.  A n’en pas douter, elle se vérifie chaque jour davantage !

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