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Banques participatives: les raisons du retard des nouveaux produits de financement

20 janv. 2020 Le Boursier

En décembre dernier, le Wali de Bank Al-Maghrib Abdellatif Jouahri a reconnu que les banques participatives tournent à bas régime, en lien principalement avec le retard de l'adoption de nouveaux contrats de financements.

Il faut dire que depuis leur démarrage effectif il y a un peu plus de deux ans, les banques participatives n'offrent qu'un seul contrat de financement, à savoir la Mourabaha, dans ses trois variantes: Immobilier, Véhicule et Equipement.

Un contrat qui reste pour la grande majorité prisé par les particuliers. Au-delà de cet unique financement, les banques participatives offrent également quasiment tous les services des banques conventionnelles, notamment l'ouverture de comptes courants et des comptes d'épargne, à travers les dépôts d'investissement.

Les autres contrats de financement, destinés notamment aux entreprises, et qui promettent de faire tourner les banques participatives à plein régime, tardent pour leur part à se mettre en place.

Contactées par LeBoursier, diverses sources professionnelles nous indiquent que ce retard est imputable aux trois parties prenantes de ce chantier, à savoir le GPBM (Groupement Professionnel des Banques du Maroc), Bank Al-Maghrib, et le CSO (Conseil Supérieur des Oulémas).

"Chacun prend son temps", nous confie une source. "Mais il faut savoir que pour chaque contrat, il faut étudier toutes les problématiques qui y sont liées, et chaque partie prend son temps dans ce sens pour élaborer ses remarques".

D'autant plus que les contrats à l'étude, et qui sont la Ijara, l'Istisna'a et le Salam, sont des contrats véritablement nouveaux pour le marché marocain, alors que la Mourabaha existait aupravant chez Dar Assafaa, la filiale participative d'Attijariwafa bank devenue à présent Bank Assafa.

"Non seulement la Mourabaha est un produit moins complexe, mais c'est un contrat qui existait déjà, et autour duquel il y avait déjà une connaissance du marché et de l'expérience client", ajoute un de nos interlocuteurs.

Mais face au retard de la mise en place des autres contrats qui forment une véritable nouveauté pour le marché marocain, une de nos sources estime que cette donne pénalise la finance participative au Maroc, qui s'avère décevante selon elle.

"Délivrer des agréments aux banques alors que les produits ne sont pas encore prêts, pourquoi faire? C'est une frustration aussi bien pour les banques que pour la clientèle", explique notre interlocuteur. 

"Je pense que les banques participatives auraient gagné plus si c'était une construction différente, similaire à celle de l'introduction de l'assurance Takaful; où les assureurs sont en train de mettre en place leurs produits avant même d’obtenir leurs agréments. Ce qui est une bonne chose car tout sera prêt chez eux lorsqu’ils vont démarrer", ajoute-elle.

Ce à quoi le Directeur d'une banque participative de la place répond: "Le Takaful doit d'abord être vendable avant de distribuer les agréments aux assureurs; ceux-ci ne peuvent pas avoir une autorisation pour ne rien faire ensuite. Même les banques participatives étaient opérationnelles rapidement après l'obtention des agréments".

Pour lui, la finance participative a réussi son démarrage, en dépit des voix de plus en plus élevées des détracteurs: "L'intérêt pour la finance participative est réel. Les banques participatives contribuent au développement réel de l’économie avec une contribution importante au financement des ménages soit pour l’acquisition de biens immobiliers ou de véhicules. Les banques se développent également à travers un réseau qui se densifie d’année en année dans tout le royaume".

"On peut dire aujourd’hui que sur le particulier, le pari est réussi", ajoute-t-il. "Il faut par contre réussir le même challenge auprès des entreprises. Mais pour l'instant, les banques participatives n’ont pas toutes les moyens pour le faire notamment au niveau des contrats, même si la demande est là et elle est palpable".

Cette demande est plutôt concentrée chez les PME, dont quelques unes se financent déjà par la Mourabaha.

Ce sont justement les contrats qui se préparent qui devront encourager plus d'entreprises à se financer via les banques participatives. Le contrat Ijara leur permettra d'investir notamment dans les équipements. L'Istisna'a, quant à lui, pourra accompagner la promotion immobilière et même la création d'entreprises; tandis que le Salam peut servir à financer le fond de roulement.

"Si on arrive à sortir tous ces contrats là en 2020, ce sera excellent", ajoute une de nos sources. "Développer le Takaful est aussi important, car il n'est pas normal d'avoir des milliards de dirhams de financements non assurés".

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